Différent
Le journal des adhérents de la fédération Sud
Santé-Sociaux
Numéro 25 - juin 2010
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Jacques Bertin, l'Intransigeant
par Claude Carrey
Jacques Bertin n'est pas une vieille connaissance à
la manière du regretté Jean Ferrat. Ce n'est qu'assez récemment
que je l'ai découvert et me suis intéressé à
l'artiste, au journaliste, à l'écrivain.
Mais c'est au chanteur que cet article sera consacré. Comment aborder
l'œuvre de Jacques Bertin car c'est d'une œuvre dont il s'agit, œuvre
que je suis loin de connaître dans sa totalité. Peut-être
faut-il aller à sa rencontre à contre-courant ? En
empruntant le fleuve, tant aimé, tant chanté, la Loire.
"Loire bleue - Loire noire - Loire royale des gueux, des poètes,
des enfants heureux/ Loire verte - qui conduit chaque homme à sa
perte - Loin ! Aux cieux !"
Plus de quatre décennies à parcourir pour arriver au début
des années soixante, période au cours de laquelle Jacques
Bertin interrompt des études de journalisme pour se lancer dans
la chanson.
Plus de quatre décennies de refus des règles du showbiz,
de fidélité à soi-même qui l'amèneront
avec les complices du moment, Jean-Max Brua, Gilles Elbaz, Jean Vasca,
à se produire dans des centaines de récital, portés
par la vague des années soixante-dix, les réseaux militants
de l'Education Populaire… jusqu'au début de la décennie
quatre-vingt, celle des "fausses roses et des vraies épines".
Cette période qui verra l'éducation populaire peu à
peu dépérir sous les effets de sa bureaucratisation et de
politiques culturelles toutes entières tournées vers les
paillettes de la modernité. Au rencart donc, la chanson à
texte et tous au Palace avec Jack Lang et Jean-Paul Goude !
Jacques Bertin lui, a entamé une traversée du désert
mais avec la persévérance de celui qui se sait en accord
avec lui-même et ses convictions.
Et il a continué à égrener ses joyaux car il faut
en parler de ce chant, ample, assuré, épuré dans
son expression mais au service de textes d'une grande qualité poétique.
Leur composition fait immédiatement surgir des images, des émotions
au point que nombre de ses chansons pourraient être comparées
à des tableaux. Chansons ? Certains parlent de poésie
chantée. Peu importe. Reste une puissance d'évocation, une
gravité souvent bouleversante pour nous parler sans pathos, ni
surenchères, des vies humbles, des paysages, de l'amour du pays,
de l'engagement.
En effet, si Jacques Bertin est un homme assurément engagé,
les textes de ses chansons n'ont rien à voir avec des tracts mis
en musique, aptes à faire danser les jours de manifs. Mieux vaut
le préciser.
Bertin, ça s'écoute. Et des métaphores qui s'éclairent
alors, de la lumière tamisée qu'elles diffusent, soutenues
par un accord de piano ou de guitare, naît l'enchantement, une forme
de bonheur.
Derniers disques parus : "Comme un pays",
2010 ou "Que faire ?", 2007 (enregistrement public
au Théâtre du Gymnase) disques Velen (http://velen.chez-alice.fr)
Si vous souhaitez découvrir davantage Jacques Bertin, deux ouvrages
: "Reviens, Draïssi ! Ecrits sur la chanson"
Editions Le Condottiere
"Chroniques du Malin plaisir" (68 articles publiés
par Politis) Editions Corlet
Enfin un DVD. "Jacques Bertin - Le chant d'un homme"
Documentaire de Philippe Lignières et Hélène Morsly.
Les Films du Sud.
Claude Carrey
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