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Jacques Bertin Un pan de la grande chanson française
Jacques Bertin, ce monsieur qui par ses interprétations et par ses chansons est tout un pan de la belle et grande chanson française, nous fait l'honneur de sa visite, d'abord pour lancer un album live et ensuite pour nous livrer trois spectacles, aujourd'hui, demain et dimanche, aux Oiseaux de passage, sur la 4e Avenue à Québec. La première fois qu'il s'est amené au Québec, c'était en 1983 et depuis, il nous a fait le plaisir de sa visite au moins une trentaine de fois pour des spectacles ou pour l'écriture d'un livre sur Félix Leclerc. Hier, il était dans la petite boîte de Limoilou, pour offrir son album
Jacques Bertin aux Oiseaux de passage,
le deuxième de cette nouvelle maison de disques et qui regroupe 22 chansons
enregistrées en décembre 2000 à l'occasion d'un spectacle de l'auteur-compositeur
français. C'est un album qui nous livre un Jacques Bertin, seul avec sa guitare et qui interprète quelques-unes de ses chansons, mais surtout de grandes chansons écrites par Ferré, Bérimont, Cadou, Salvador, Giraudoux et Aragon. C'est un disque un peu dépouillé, mais d'une richesse incroyable et même s'il trouve le mot intimiste un peu galvaudé, il rend bien toute la simplicité de Jacques Bertin sur cette production. Il n'en est pas à son premier album live, il en a au moins trois, mais ce dernier a été fait dans des conditions plutôt particulières, un peu à son insu. Les lives qu'il a faits précédemment avaient été préparés, planifiés, enregistrés, réenregistrés, mais celui qui nous occupe, il n'était même pas au courant qu'on l'enregistrait au moment du spectacle. Ce n'est qu'après que Pierre Jobin, le patron des Oiseaux de passage, boîte et maison de disques, lui a fait entendre l'enregistrement et l'a convaincu de le graver sur un album. À son écoute, Jacques Bertin y voit certes quelques défauts, une phrase mal dite, un mot mal prononcé, mais tout ça appartient beaucoup plus au sens autocritique très développé qu'il possède. Pour le commun des mortels, c'est l'enregistrement d'un spectacle avec toutes ses qualités, tous ses défauts, mais surtout avec toute son émotion. Il y a aussi toutes les qualités des chansons qu'on y retrouve. Quand on demande à Jacques Bertin de porter un jugement sur la chanson française, il ne croit pas qu'elle mourra ou disparaîtra. Il en est inquiet, mais y croit encore, et ce malgré que l'industrie culturelle, radio et maisons de disques, boudent la grande chanson.
Pour lui, la carrière a commencé à la fin des années 1960 et s'est bien poursuivie jusqu'au milieu des années 1980. Le rock est arrivé et tout a basculé. Les disques vinyles ont disparu pour être remplacés par les CD, ce qui a creusé un énorme trou. Mais actuellement, lui qui dans les pires années ne donnait que très peu de spectacles, il avoue que la fréquence a augmenté sensiblement, puisque rien que cette saison, il en fait au moins une quinzaine. Ceux qui connaissent Jacques Bertin savent qu'il a fait uniquement de la chanson de 1967 à 1989 et qu'à partir de ce moment, jusqu'à il y a quelques jours, il a aussi exercé le métier de journaliste. Il a travaillé comme rédacteur en chef des pages culturelles de l'hebdo de gauche, Politis, jusqu'à il y a un an et demi et il y signait encore récemment une chronique sur la politique culturelle. Récemment ses patrons ont refusé de passer une de ses chroniques et il est parti en claquant la porte. Quand il en parle, il porte un jugement sévère sur la gauche en France, un mouvement qui s'est drôlement ramolli avec l'âge et devenu beaucoup trop complaisant à son goût. Peu importe, ça lui donnera maintenant plus de temps pour la chanson. Les spectacles qu'il donne à compter d'aujourd'hui sont différents de ceux qu'il avait donnés l'an dernier. Cette fois, il est accompagné d'un pianiste et au lieu de faire en majeure partie les chansons d'autres auteurs-compositeurs, il fera plus des siennes. Le même spectacle sera offert à Montréal, au Petit Medley, le 4 décembre.
Jacques Samson |