Le Devoir


1er décembre 2005

Jacques Bertin et ses mots qui chantent sont de retour

 

Jacques Bertin est entré en 1967 dans le monde de la chanson par la grande porte, celle de l'Académie Charles-Cros, celle-là même qui s'inclinait devant la virtuosité de Pierre Lapointe la semaine dernière. Trois décennies plus tard, le chansonnier pose ses pénates au Gesù pour un soir, la tête pleine des mots qui l'ont habité, les siens mais aussi ceux de Prévert, Cadou et Vigneault, mis en musique par des légendes comme Ferré, Léveillée ou Leclerc.

Dilettante, Jacques Bertin se plaît à passer de ville en ville, où il sème sa poésie dans la plus grande intimité. Outre son inséparable guitare, l'homme de scène a cette fois-ci glissé dans ses bagages son dernier disque, No surrender… une sorte de bataille. On reconnaît là l'artiste qui, même s'il tourne le dos au show-business - "l'ennemi numéro un de l'humanisme", se plaît-il à répéter- reste fidèle à son public et à son amour des mots qui chantent.

Ceux qui connaissent Jacques Bertin savent son affection pour le Québec, qu'il fréquente avec fidélité depuis le début des années 80. Sa meilleure carte de visite aura été celle de son ami et "modèle de conscience", Félix Leclerc, à qui il a consacré une biographie en 1987, Félix Leclerc, le roi heureux.

De Félix Leclerc, il a aussi retenu une phrase qu'il aime à rappeler. "Je ne suis pas un chanteur, je suis un homme qui chante…" Pour cet artiste frugal, le secret de la musique est dans l'âme, pas ailleurs. Une qualité en voie de disparition chez la nouvelle génération, regrettait-il récemment à La Charente libre : "Quand vous entendez Leclerc, Ferré ou Brel, vous avez le sentiment tout de suite qu'ils sont aux prises avec les grandes choses. Ça chante, ça vibre."

Hors des modes et hors du temps, le chanteur-poète préfère rester fidèle à ces mots qui ont gardé de solides racines du côté de l'école de Rochefort. En effet, les plumes de Jean Bouhier, René Guy Cadou ou Luc Bérimont ne sont jamais loin.

Samedi au Gesù, elles seront là, bien vivantes. Dès 20h, la voix chaude et posée du chansonnier entamera son périple nostalgique, les deux pieds dans un temps élastique où ses dernières pièces côtoieront celles des grands maîtres français et québécois.


Louise-Maude Rioux Soucy