16 mai 2011

 


 




Mes impressions de lecture - Denis Billamboz

 

Une affaire sensationnelle

A Chalonnes, sur les bords de la Loire, deux surnuméraires, des célibataires endurcis, ceux qu’on met toujours au bout de la table ou là où il faut boucher un trou, Edmond, un ancien militaire prestigieux, et Léonie, une vieille fille rangée au rang des grenouilles bénitiers, finissent par s’aimer à force d’avoir été installés aux mêmes places et affectés aux mêmes fonctions dans toutes les activités locales. Et, pour donner un sens à leur amour ? Pour se construire quelque chose de commun ? Pour se prouver qu’ils existent encore ? Ou tout simplement pour se venger de ceux qui les ont trop souvent ignorés, ils décident de monter un coup incroyable, impensable, sensationnel.

Il croit qu’elle plaisante. « Elle est folle, se disait Edmond. Elle est folle, c’est certain. Elle est sensationnelle. » Mais, elle démonte tous les arguments contre ce projet, déjoue tous les pièges, résout toutes les énigmes, a une solution à tout et pour tout. Et nos deux célibataires se muent en Bonnie and Clyde des bords de Loire pour se lancer dans l’aventure qui les fera, ils n’en doutent pas, sortir de l’insignifiance dans laquelle ils étaient enfermés.

Un roman certes régionaliste, une belle ode à la douceur angevine qui règne à Chalonnes aussi, un hommage à tous ces humbles qui habitent cette région et qui ont appris de leurs ancêtres, survivants des Vendéens persécutés par la Révolution, la solidarité et la modération, mais aussi un livre qui pose des questions qui dépassent largement le cadre habituel du genre. Une belle histoire d’amour, une fine analyse des effets de la solitude, une réflexion sur la religion, la société, l’être…

Et, pour finir, dans une belle écriture, juste, fluide, délicate, l’auteur essaie de nous faire comprendre que malgré les différences, la vie peut encore être belle, même à un certain âge, et même si la morale doit, parfois, s’accommoder de mœurs parfaitement amorales. Il se sentait en échec, « Il portait sur son dos, son propre fils qu’il n’aurait jamais. Il portait l’échec. Sa propre vie. Tout ce qui rate, la mort, le rien. » Elle n’existait déjà plus, survivant tout juste, et en réunissant leurs deux solitudes, ils ont peut-être su trouver leur voie même si…  

« Dieu peut comprendre qu’on romance un peu. »

Denis Billamboz
Denis Billamboz
16 mai 2011




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